Gazagne Naturopathe

Orthorexie : quand nutrition rime avec obsession

Orthorexie : quand nutrition rime avec obsession

Le terme « orthorexie » a été employé la première fois par le médecin américain Steven Bratman en 1997. Les observations de Bratman mènent toutes à la conclusion que les personnes qu’il qualifie d’orthorexiques ont toutes un point commun qui est la « recherche d’une alimentation saine et correcte ».
En France, 2 à 3% de la population serait aujourd’hui atteinte d’orthorexique.

L’orthorexie, qu’est-ce que c’est ?

Elle fait référence à un ensemble de comportements alimentaires qui correspond à un besoin extrémiste de manger « sain et correct ». Elle survient quand l’obsession du « manger sain » devient particulièrement malsaine.

La volonté première de ses personnes est de se sentir bien dans son corps via le maintien d’une bonne hygiène de vie surtout alimentaire. Cette réflexion paraît plutôt logique en soi et compréhensible et rentre volontiers dans une volonté collective que de nombreuses personnes partagent.

Le phénomène, plutôt sain au départ, devient pathologique quand

  • Il s’installe sur un terrain fragile basé sur de la peur : peur d’être empoisonné, peur de développer une maladie grave, peur de manquer, peur d’un excès ou encore peur du jugement d’autrui, …
  • Des personnes avec des croyances erronées et un esprit rigide en général et en particulier sur le corps, les aliments et la relation entre les deux
  • Il devient obsessionnel
  • Il entraîne des phobies alimentaires ou l’isolement de la personne
  • Il devient handicapant, culpabilisant et souffrant

Les sujets orthorexiques s’imposent des règles très strictes pour manger sainement. C’est une obsession pour ces personnes avec un éthique nutritionnelle excessive.

Actuellement, cette maladie n’est pas spécifiquement reconnue par le DSM-5, manuel de référence diagnostic, mais les médecins la considèrent souvent comme un trouble alimentaire atypique, une anorexie mentale particulière basée non pas sur le quantitatif mais sur la qualitatif et qui possède de nombreux points communs avec les troubles obsessionnels compulsifs (TOCs).

Qui est concerné ?

Tout le monde ne devient pas orthorexique. Elle touche plus particulièrement les personnes jeunes mais également les diététiciens et autres professionnels du domaine de la santé nutritionnelle, les sportifs, les végétariens, les végans.

Cas des sportifs

Certaines disciplines sont prédisposées à l’orthorexie : le yoga, pilâtes et autres disciplines qui allient « bien-être » et notamment un concept de « purification », mais également les sports qui incluent un aspect esthétique (gymnastique, danse), une performance (course, saut en hauteur) ou des catégories de poids (jockey, arts martiaux, …).
On retrouve un même effet culpabilisant en cas de « non-respect » des règles puisque résultats et performances sont étroitement liés et souvent dépendant du comportement alimentaire. On rentre dans un véritable cercle vicieux :

Orthorexie

Tout ceci mêlé à une forte influence sociétale basée sur les apparences et le résultat.
Les réseaux sociaux se chargent du couperet final en matière de jugement ce qui renforce le mal-être et le sentiment de culpabilité.

Comment cela se traduit-il ?

Les personnes qui présentent ces troubles font focus sur la qualité nutritionnelle des aliments plus que sur la quantité. Il y a les aliments considérés comme « purs » et ceux jugés comme « impurs » qui ne sont pas issue de la culture biologique et contiennent des pesticides, fongicides ou autres traitements alimentaires.

D’autres facteurs rentrent en compte comme la préparation des aliments, les associations alimentaires, le mode de cuisson, …

Au quotidien, l’orthorexie est une activité obsessionnelle très chronophage. La personne peut passer plusieurs heures dans les magasins, scanner le produit qui coche toutes les cases, rechercher les bonnes enseignes commerciales qui proposent ce qu’elle cherche, lire et déchiffrer toutes les étiquettes, traquer les additifs, dénicher les bonnes recettes, construire les bons menus, confectionner les repas adéquats, à quelle heure consommer tel produit et pas tel autre … Bref, on ne fait plus que ça !! et tout manquement est très anxiogène et culpabilisant.

Par exemple, il y a des personnes qui ne mangent pas de fruits qui ont été cueillis depuis quinze à vingt minutes, ou des personnes qui ne consomment que des graines …

Nombre d’orthorexiques pensent que manger sainement est étroitement associé à l’estime de soi et que ce mode alimentaire permet de « devenir meilleur ».

L’évitement de certains magasins : fréquenter certains magasins peuvent devenir très anxiogène au profit d’autres enseignes plus en rapport avec les croyances du sujet.

Le côté « plaisir alimentaire » est relayé au second plan : seul compte l’aspect qualitatif de l’aliment. La notion de « plaisir » passe avant tout par la « satisfaction » de manger sain et dans la mesure où le sujet a pu respecter ses règles.

Un isolement social : le fait de manger dans un autre lieu (chez des amis, au restaurant, …), de consommer un autre repas cuisiné par d’autres peut être fortement anxiogène voire engendrer des crises de panique.

Des comportements compensatoires : le fait de ne pouvoir respecter ses propres règles crée de la culpabilité qui aura pour conséquence soit le durcissement des règles initiales soit la mise en place de comportements compensatoires comme par exemple le jeûne, les cure détox ou la monodiète sur plusieurs semaines.

Des carences nutritionnelles : l’exclusion alimentaire peut porter sur un aliment ou un groupe d’aliments avec des répercutions physiologiques importantes qui vont altérer l’état de santé.

L’orthorexie est souvent associée avec un comportement hypochondriaque qui se traduit par une intolérance au gluten, au lactose voire des allergies qui entraînent l’éviction d’un aliment ou d’un groupe d’aliments et un usage abusif des compléments alimentaires.

Quelles sont les origines ?

Selon Bratman, l’orthorexie puise son origine dans les différents mouvements alimentaires et autres tendances qui nous viennent tout droit des États-Unis. Ce sont principalement :

Le crudivorisme

Le crudivorisme, également connu sous le nom d’ « alimentation vivante », consiste à consommer de la nourriture bio non cuite . Les adeptes de cette pratique alimentaire estiment que des aliments sont délétères, qu’elle élimine le potentiel nutritionnel notamment les vitamines, minéraux et oligoéléments.

Actuellement, on distingue 3 sortes de crudivorisme : les crudi-végétariens , les crudi-végétaliens et les crudi-carnivores.

Les crudi-végétariens : leur régime est identique à celui d’un végétarien classique, sauf qu’ils consommeront leurs aliments crus

Les crudi-végétaliens peuvent être granivores et/ou frugivores

Les crudi-carnivores : la viande constitue une part plus ou moins importante de leur régime.

L’instinct-nutrition

L’instinct-nutrition est pratiquée par certains crudivores. Elle consiste en la préparation d’aliments crus en prenant soin de ne pas ajouter d’artifice qui pourraient altérer la saveur, l’odeur, la texture de ce dernier.

Dans cette pratique, on ne mélange pas les aliments, on n’assaisonne pas, on consomme tel quel.

Le végétarisme

Le végétarisme correspond à l’exclusion de toute chair animale. Il privilégie la consommation de végétaux comme les fruits et les légumes, de même que certains dérivés animaux comme les œufs, les produits laitiers ou encore les produits de la ruche.

Les principaux sous-groupes sont :

  • Les lacto-ovo-végétariens qui acceptent les produits laitiers et les œufs
  • Les lacto-végétariens qui consomment des produits laitiers mais pas d’œufs
  • Les ovo-végétariens qui mangent des œufs mais pas de produits laitiers

Mais il en existe beaucoup d’autres comme par exemple les pesco-végétariens qui consomment du poisson et des fruits de mer mais exclut la viande, les pollo-végétariens qui consomment ni viande rouge ni poisson mais admettent la volaille.
Et les semi-végétariens qui préconisent l’exclusion de la viande rouge.

Le végétalisme

Le végétalisme exclut tout produit d’origine animale et refuse toute forme d’exploitation animalière, ce qui passe par le cuir, les cosmétiques, les produits de la ruche ou encore les huiles de poisson. Ils acceptent de consommer les produits végétaux et leurs dérivés à savoir fruits, légumes, céréales, graines et légumineuses.

Conclusion

Depuis quelques années, la notion d’orthorexie suscite l’intérêt des professionnels de santé mais le débat reste ouvert car il est difficile de situer le normal du pathologique, de quantifier le trouble qui se présente.
Néanmoins, le comportement alimentaire n’est que le reflet d’un trouble plus profond qu’il est important d’identifier et d’accompagner comme il se doit.

Sources :
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  2. Orthorexia nervosa – a distorted approach to healthy eating.
    Gortat M, Samardakiewicz M, Perzyński A.Psychiatr Pol. 2021 Apr 30;55(2):421-433. doi: 10.12740/PP/125387. Epub 2021 Apr 30.PMID: 34365489
  3. Orthorexia nervosa and healthy orthorexia as new eating styles.
    Barthels F, Barrada JR, Roncero M.PLoS One. 2019 Jul 10;14(7):e0219609. doi: 10.1371/journal.pone.0219609. eCollection 2019.PMID: 31291364
  4. Eating Disorders.
    Balasundaram P, Santhanam P.2023 Jun 26. In: StatPearls [Internet]. Treasure Island (FL): StatPearls Publishing; 2023 Jan–.PMID: 33620794
  5. Instagram use is linked to increased symptoms of orthorexia nervosa.
    Turner PG, Lefevre CE.Eat Weight Disord. 2017 Jun;22(2):277-284. doi: 10.1007/s40519-017-0364-2. Epub 2017 Mar 1.PMID: 28251592
  6. Orthorexia Nervosa in Adolescents and Young Adults: A Literature Review.
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